Formulaire administratif : Refus « Parent 1 » – « Parent 2 »

Modèle de formulaire administratif pour refuser les mentions « Parent 1 » et « Parent 2 »

(Prénom NOM)
(Adresse)

 (Ville), le (date)

Mme / M. XX

(Adresse)

Madame, Monsieur,
Je me permets d’attirer votre attention sur le fait suivant, qui exige de votre part la réponse la plus rapide possible. Je ne puis en effet rester sans réagir devant la discrimination dont je suis victime.
Dans le cadre de (activité, inscription…), j’ai naturellement dû remplir un dossier administratif, comprenant le formulaire ci-joint.
Or, il s’avère que ce document administratif comporte les mentions : « Parent 1 » (ou « Représentant légal 1 ») et « Parent 2 » (ou « Représentant légal 2 »), en lieu et place des mentions : « Père » et « Mère », que j’ai bien évidemment rétablies.
Le fait d’exiger que je remplisse, tel qu’il est rédigé, ce formulaire, préalable obligé à tout aboutissement de la procédure administrative que je sollicite, non seulement constitue une violation directe de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, mais encore crée à mon encontre un préjudice moral particulièrement grave dont la collectivité que vous représentez est responsable.
Pour mémoire :
Le communiqué de presse du Conseil des ministres du 7 novembre 2012 affirme que : « Lorsque cela est strictement nécessaire, les mots « père et mère » sont remplacés par le mot « parent » et les mots « mari et femme » par le mot « époux ». Ces modifications ne sont pas systématiques. En outre, elles ne concernent pas les actes d’état civil et le livret de famille, dont la forme n’est pas régie par la loi. Ces actes, ainsi que le livret de famille continueront à utiliser les termes de « père et mère » dès lors qu’il s’agira de couples de personnes de sexe différent » ;
L’exposé des motifs de ladite loi énonce que : « Lorsque cela s’avère nécessaire, les mots « père et mère » sont remplacés par le mot « parents » et les mots « mari et femme » par le mot « époux ». Ces substitutions concernent uniquement les articles qui s’appliquent à tous les couples. Dans tous les autres cas, les articles ne sont pas modifiés : tel est le cas dans l’ensemble des dispositions concernant la filiation établie par le seul effet de la loi » ;
L’étude d’impact de la même loi contient les phrases suivantes, tout à fait explicites : « La réforme envisagée n’aura pas de conséquence sur les actes d’état civil (actes de naissance, de reconnaissance, de mariage et de décès) relatifs aux couples hétérosexuels » (§ 4-1.1.3, p. 26) et « S’agissant des autres branches du droit civil, il conviendra de procéder aux seules adaptations légistiques strictement nécessaires afin d’adapter les textes qui visent actuellement « le père » ou « la mère » et de permettre qu’ils puissent aussi régir la situation des couples de deux pères ou de deux mères » (§ 4-1.1, p. 25) ;
De même, la circulaire du 29 mai 2013 de présentation de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe est on ne peut plus claire : « le mariage entre deux personnes de même sexe n’emporte aucun effet en matière de filiation non adoptive » (§ 1, p. 2) ;
A la tribune de l’Assemblée Nationale et du Sénat, la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Madame Taubira, n’a cessé de rappeler que (1) les diverses versions du projet du Gouvernement n’avaient jamais compris les expressions « parent 1 » et « parent 2 » et que (2) les adaptations qui étaient faites au niveau législatif et qui seraient faites au niveau règlementaires ne remplaceraient jamais, pour les couples de personnes de sexe différent, les mentions du « père » et de la « mère » par ces expressions. Le Journal officiel des débats des chambres parlementaires fourmille de ces rappels qu’il est inutile de citer.
Le décret n° 2013-429 du 24 mai 2013 portant application de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 n’a lui-même procédé qu’aux seules adaptations terminologiques strictement nécessaires au regard du vote de la loi.
Est-il enfin besoin de rappeler que l’arrêté du 24 mai 2013 modifiant l’arrêté du 29 juillet 2011 modifiant l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille (rectificatif) est précisément venu remplacer l’arrêté modificatif qui venait juste d’être édicté afin de mieux prendre en compte le fait qu’il existe aujourd’hui deux types de mariage en droit français, en instituant deux livrets de famille différents ?
Les couples continuant à se fonder sur l’altérité sexuelle bénéficient en effet d’une loi spéciale dérogatoire à la loi générale, en vertu du nouvel article 6-1 du code civil, issu de l’article 13 de la loi du 17 mai 2013, qui exclut le titre VII du livre Ier du code civil de la réforme que la loi opère. Ainsi, non seulement l’intention du législateur, constante et manifeste, a été de préserver les couples de personnes de sexe différent de toute atteinte à leur droit élémentaire de voir reconnue leur altérité sexuelle comme origine de la filiation de leurs enfants, mais encore la lettre même de la loi impose, oblige et exige que tous les actes administratifs devant prendre en compte la filiation ainsi établie au regard des règles du code civil, respectent cette altérité sexuelle.
Si la loi générale use de termes génériques, identiques à ceux utilisés pour la loi spéciale des couples de personnes de même sexe, il n’en est donc pas de même pour la loi spéciale des couples de personnes de sexe différent. Or, les formulaires administratifs sont tenus de prendre en compte ces différences terminologiques, qui forment l’expression même du droit fondamental reconnu aux couples fondés sur l’altérité sexuelle de continuer à rendre public et opposable à l’administration ce choix.
La violation de ce droit fondamental constitue une discrimination abusive, prohibée et réprimée par les articles 225-1 et 225-2 (4°) du code pénal.
Elle constitue également une rupture de l’égalité devant la loi, protégée par la Constitution française à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et à l’article 1er de la Constitution de 1958, ainsi qu’une rupture de l’égalité devant le service public, principe général du droit (cf. CE, 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire) et principe à valeur constitutionnelle (cf. décision du Conseil constitutionnel n° 79-107 DC du 12 juillet 1979).
Elle constitue enfin une violation de mon droit à mener une vie familiale normale, garanti par la Constitution française (dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, cf. décision du Conseil constitutionnel n° 2012-248 QPC du 16 mai 2012, 5ème considérant) et la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du Conseil de l’Europe (article 8).
En outre, l’utilisation des termes « parent 1 » (ou « représentant légal 1 ») et « parent 2 » (ou « représentant légal 2 ») introduit une inégalité manifeste entre les parents que je ne peux partager. En se référant à une numérotation, ces expressions créent en effet nécessairement une inégalité, là où les mentions « père » et « mère », en ne signifiant que l’altérité sexuelle, consacraient l’égalité des parents.
En conséquence, je demande que, dans les plus brefs délais, vous mettiez à ma disposition, comme à celle de tout couple de personnes de sexe différent usager des services publics gérés par votre collectivité, des documents administratifs et des formulaires conformes à la loi du 17 mai 2013 et comportant les termes « père » et « mère », à l’exclusion de tous autres.
En application de l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, en l’absence de réponse de votre part dans les deux mois de la réception de la présente demande, je devrais considérer que vous m’opposerez un refus implicite de modifier lesdits formulaires administratifs.
Ce faisant, je me verrais contraint d’user de toutes voies de droit afin de faire cesser la discrimination dont je suis victime, de faire annuler tout acte illégal que vous auriez pris et, le cas échéant, de voir engager votre responsabilité afin de réparer le préjudice que je subis injustement. Je porterais également ce refus à la connaissance du Défenseur des droits et du Procureur de la République.
En vous remerciant de l’attention que, j’en suis certain, vous porterez à ma demande.

(signature)

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Publié dans : Législation et jurisprudence