Canada : la coopération comme problème moral est admise

Si l’objection de conscience est reconnue aux médecins canadiens qui refusent de participer à l’euthanasie, en revanche ceux-ci doivent orienter le demandeur vers un médecin qui accepterait de pratiquer l’euthanasie. En aidant la personne à trouver un médecin et donc en l’accompagnant dans sa démarche de suicide, nous avons affaire ici à un cas de coopération. En France, c’est le même problème qui se pose pour les médecins qui reçoivent en consultation pour l’avortement. Ceux-ci doivent également réorienter la personne vers un autre médecin.

Ces problèmes de coopération ont été pris à bras le corps par L’Association médicale canadienne (AMC). Les médecins devraient avoir le droit de refuser de prodiguer de l’aide à mourir à leurs patients. Et ils devraient aussi avoir le droit de refuser de rediriger vers un confrère mieux disposé les patients qui demandent à mourir. Selon l’Association, cette protection de la liberté de conscience du corps médical n’affectera pas pour autant l’accès des malades à l’aide médicale à mourir.

L’AMC comparaissait mercredi soir devant le comité parlementaire mixte devant proposer au gouvernement des façons d’encadrer l’aide médicale à mourir dans la foulée de la décision de la Cour suprême. L’AMC dit avoir consulté ses membres longuement. Résultat : 30 % d’entre eux se disent disposés à prodiguer activement la mort aux malades qui n’en peuvent plus de souffrir. Une majorité des autres seraient disposés à rediriger vers un autre médecin un patient désireux de mourir. « Pour les autres médecins, rediriger les patients pour de l’aide à mourir serait catégoriquement inacceptable d’un point de vue moral. Pour ces gens, cela équivaut à de la participation forcée », a expliqué Jeff Blackmer, le vice-président de l’AMC. « Nous nous attendons à ce que seulement 3 % des gens considèrent cette option et il y a environ 82 000 médecins membres de l’AMC […], alors c’est important de remettre tous ces chiffres en perspective », a répondu la présidente de l’AMC, Cindy Forbes. M. Blackmer a renchéri. « Ce 30 % représente 24 000 médecins. Alors je peux affirmer à ce comité que l’accès ne posera pas de problème. […] Établir un lien entre l’accès et l’objection de conscience est une fausse dichotomie. Il n’y a pas de lien. »

Commentaire d’objection! : on a ici un  exemple de cohabitation possible entre deux droits (droits de conscience vs « droit à mourir dans la dignité ») mais cet équilibre reste par définition fragile car les les deux droits doivent cohabiter dans la durée. Si par exemple le nombre de médecins qui souhaitaient ne pas rediriger augmentait, il faudrait évidemment revoir le dispositif et tout cela au détriment de la liberté de conscience.

 

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