Voici un témoignage fort instructif des pressions subies par des professionnels qui pourtant ne commettent aucune illégalité. Ce témoignage conforte les légitimes inquiétudes qui pèsent aujourd’hui sur les corps médical au sujet de leur clause de conscience
Médecin généraliste, j’ai d’abord exercé comme remplaçant pendant plus de 3 ans après la fin de mon internat. Lors de ces remplacements, j’ai eu beaucoup de mal à prendre position concernant la prescription de contraceptifs : je n’osais pas m’opposer à la pratique de mes confrères. Fin 2012, on m’a proposé une collaboration libérale. J’ai accepté à une condition : exercer la gynécologie de manière éthique. Je ne prescris donc aucune contraception orale, pas de stérilet, pas d’implant, pas de patch mais j’informe les patientes sur ces différentes contraceptions, sur les raisons qui m’incitent à ne pas prescrire et je les informe également sur les méthodes naturelles de régulation des naissances. Cette information présente évidemment les points positifs et négatifs de chaque méthode. La patiente reste libre dans son choix et surtout mes confrères présents dans le même cabinet proposent ce que je ne fais pas. Mes confrères ont accepté ce fonctionnement et respectent mes choix. Il en est de même pour les demandes d’avortement. Je n’adresse pas moi-même au centre d’orthogénie mais j’informe la patiente quant à l’IVG et ma position quant à cette prise de position.
Cette forme de pratique est parfois très chronophage mais elle est très riche quant aux échanges qu’elle permet avec les patientes et parfois patients. Mon refus de prescrire n’est pas un jugement mais plutôt une interpellation quant à la désinformation des patients concernant ces sujets.
Je sais que cela ne sera pas sans écueil… A ma demande, je me suis rendu récemment devant le conseil départemental de l’ordre pour diverses raisons, et j’ai eu la mauvaise surprise de voir cette question abordée. En effet, des confrères du centre d’orthogénie de l’hôpital ayant eu écho de mes pratiques en ont informé le président du conseil. On m’a demandé de changer mes pratiques, invoquant le fait que j’exposais les jeunes filles à un risque accru d’IVG. On m’a prévenu que je risquais un jour un procès de la part de patientes ou de leurs parents et que la loi serait probablement contre moi (1).
Je suis sorti de cet entretien assez éprouvé mais je veux continuer à informer et à aider les patients à faire des choix éclairés.
Il faut bien évidemment ne pas rester seul lorsque l’on décide de pratiquer notre art de manière éthique et serais ravi de faire partie d’un réseau de médecins ayant fait les même choix (2).
- Ces propos tenus par le conseil départemental de l’ordre sont particulièrement choquants et préoccupants. En effet, un médecin généraliste exerce une profession libérale et il n’est pas légalement tenu de prescrire des contraceptifs, d’autant plus qu’il existe différents procédés de contrôle de régulation des naissances, exposés par le praticien. Les membres de ce conseil suggèrent-ils que cette absence de prescription pourrait être qualifiée de « faute professionnelle ? ». L’argument du « risque d’IVG » est fallacieux car on sait que le recours massif à la contraception n’a pas fait baisser le nombre d’avortement en France.
- Nous incitons vivement les médecins qui agissent comme l’auteur du témoignage à prendre contact avec lui, par notre intermédiaire.