Je suis interne en gynécologie-obstétrique. C’est un choix que j’ai fait après avoir beaucoup travaillé pour y arriver. C’est un choix libre. Cependant dès le premier jour, la réalité a été toute autre. Les IVG jusqu’à 12 semaines sont réalisées par les internes, c’est la tâche du matin.
J’ai demandé à mes co-internes si cette pratique était obligatoire. Et j’ai eu en substance les réponses suivantes : « oui, personne n’aime faire ça mais on n’a pas le choix », « le chef de service n’aime pas qu’on s’oppose », « tu risques de ne pas avoir de poste post-internat ». Je me suis demandée comment je sortirai de cette impasse et notamment comment je pourrai avoir une bonne formation si je m’opposais. Je n’avais jamais voulu faire d’avortement. J’ai choisi cette spécialité pour la vie, pour soutenir et respecter LA VIE et pour moi c’est une réelle chance d’accueillir un enfant dans une famille. Par ailleurs j’ai été confrontée longuement au désespoir des femmes faisant des fausses couches contrastant avec celles qui demandaient des IVG pour toutes sortes de raison. Je pensais initialement que la lutte contre les IVG passait par une bonne contraception mais souvent la plupart des IVG font suite à des échecs de pilules.
D’une part je ne comprenais pas pourquoi l’IVG étant un choix pour la patiente, je ne pouvais pas avoir le choix de ne pas en faire. En fait, les femmes ne doivent pas prendre conscience qu’il s’agit d’un futur enfant, il ne faut surtout pas utiliser des termes qui pourrait supposer son existence.
Cependant moi je suis consciente qu’à huit semaines c’est un embryon dont on voit déjà la formation des mains, des pieds… Prendre conscience qu’à douze semaines c’est un être formé, quelle expérience ! Je n’en pouvais plus, je ressentais beaucoup de culpabilité et commençais à me demander si j’avais fait le bon choix. Je n’avais plus aucune envie d’aller en stage, je ne respectais pas mon éthique : cela valait-il le coup de faire cela pour avoir un poste ???!!!
Au cours de ma pratique j’ai ressenti qu’il y avait beaucoup de dysfonctionnements :
- Ne serait–il pas nécessaire de réaliser une véritable éducation de la femme et de son partenaire ? L’IVG doit-elle une fatalité de la vie, la seule réponse offerte à toute forme de grossesse non désirée ?
- J’ai eu la chance d’être orientée vers les bonnes personnes. Après beaucoup de peur, j’ai pu discuter avec mon chef de service. Il a été convenu que je n’en ferai pas pour le moment… Déjà une victoire, même si parfois je n’ai pas le choix d’en réaliser quand je suis la seule interne du service…
Je voudrais souligner qu’il y a beaucoup de femmes courageuses et que je respecte leur choix sans les juger malgré les difficultés qu’il m’est donné de pratiquer les IVG.